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                              Mémé Georgette pète les plombs

     

             « Finalement, je ne suis pas d’accord, déclare mémé Georgette, le regard étrangement fixe.

             — Avec quoi t’es pas d’accord, mémé ?

             — La dépénalisation du délit d’outrage. Dans quelque régime politique que ce soit, quand la politesse fout le camp, tout fout le camp. 

             — Ah bon ? On n’a plus le droit de dire merde aux flics, alors ?

             — Non. Ni de hurler « Casse-toi pôv’con » sur le passage du président. Ni d’écrire que son fils ira-loin-ce-petit. Ni d’envoyer des mails à la garde des sceaux sous le label « Rachida-la-grosse-pute » — d’autant qu’à travers elle, c’est toutes les femmes qu’on humilie...

             — Tu te sens concernée, toi ?

             — Et comment ! Insulter une personne — que dis-je ? une icône ! — qui incarne avec tant de brio ce qu’il y a de meilleur chez ses contemporaines : la beauté, l’élégance, la réussite sociale, l’intelligence, la maternité triomphante, etc, c’est fouler au pied l’essence même de la féminité... Le monstre qui a commis cette infamie mérite perpète !

             — Tu exagères !

             — Du tout ! Ce serait moi, je rétablirais les galères, tiens ! Ou alors, les culs de basse fosse à la Louis XI, où l’infâme internaute croupirait dans ses déjections, sans air, sans lumière et sans ordinateur !

             — M’enfin, mémé...

             — Il y a des valeurs avec lesquelles on ne transige pas, ma petite ! Le respect de l’Autorité en fait partie. N’oublie jamais que c’est l’un des fondements de la République !

             —  On peut continuer à se moquer du pape, au moins ?

             — Bien sûr que non ! Ni du pape (même promoteur de sida), ni des évêques (même nazis), ni des moines (même paillards), ni des curés (même pédophiles) ! Ce sont les représentants de Dieu sur terre, nous devons les vénérer à genoux ! »

             OK, j’ai compris, c’est le 1er avril. N’empêche, durant quelques instants, j’ai flippé grave ! J’ai cru qu’elle yoyotait, mémé


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                                  Le temps des martyrs.

     

             «  Putain ! éructe mémé Georgette. Faut alerter le pape ! 

             — Le pape ? Pourquoi faire ?

             — En  février 2008, dans la gare Saint-Charles, à Marseille, un prof de philo de 47 ans a eu une vision céleste. En plein contrôle policier, il est soudain tombé à genoux, les bras en croix, en criant par deux fois, d’une voix forte : « Vierge Marie, je te vois ! ».

             — Non ?! Et comment ont réagi les gens ?

             — Ils ont éclaté de rire, cette bande de mécréants. Résultat : les flics ont cru que le type se foutait de la religion, et ils l’ont embarqué.

             — Euh... T’es sûr qu’il ne criait pas plutôt « Sarkozy, je te vois »?

             — Tu rigoles ? Dans ce cas, on ne l’aurait pas arrêté. Bon, il aurait crié « je t’encule », j’aurais compris — quoique ! —, mais « je te vois », franchement, là, l’infraction m’échappe... En plus, personne ne tombe à genoux quand il voit Sarkozy (sauf peut-être son épouse, mais, bien que le couple présidentiel ne soit pas d’une pudeur forcenée en ce qui concerne sa vie privée, je ne m’aventurerais pas sur ce terrain miné) !

             — Tu te fous de moi, mémé ?

             — Pas du tout, mon enfant, j’essaie juste de comprendre. Parce que le visionnaire est quand même traduit en justice. Une amende de 100 euros est requise à son encontre. Or, seul le fanatisme religieux peut justifier une telle aberration...

             — Tu veux dire que le nom de Sarkozy est sacré ?

             — Je le suppose, puisque le simple fait de le prononcer est passible des tribunaux.

             — Ça fout les jetons !

             — Et pas qu’un peu ! Nous saurons le 3 juillet, quand la sentence tombera, si une ère d’Inquition civile vient de s’ouvrir, en France. Voici peut-être revenu le temps des martyrs... »

     


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                               Le petit fiancé de l’Amérique

     

             « Les lieux communs ont peut-être un fond de vérité, déclare mémé Georgette d’un air pensif.

             — Pourquoi tu dis ça ?

             — Dans ma jeunesse, tout le monde prétendait que « les Américains étaient de grands enfants ». Ça me gonflait, à l’époque !

             — Et maintenant ?

             — Moins... T’as entendu parler de Jonathan Krohn ?

             — Non, qui c’est ?

             — Un petit surdoué qui enthousiasme les foules.

             — Comme Jordi ?

             — Pire : il ne chante pas, il cause ! Il enchaîne les conférences et les meetings. Et il pond des projets de société salement réactionnaires...

             — ... ?

             — Après l’ogresse Palin, la droite étazunienne a trouvé un nouvel emblème : le petit génie malfaisant... Son livre Define Conservatism prône une idéologie ultra-conservatrice dont le but est, je cite, « de protéger les droits des bons citoyens ».

             — Et il a quel âge, ce trouduc ?

             — 14 ans. L’âge idéal, en terme de marketing, pour attirer les jeunes générations !

             — Son bouquin, tu crois que c’est lui qui l’a écrit ?

             — Ça, mystère... En revanche, sur scène, il a un aplomb de vieux routard du showbiz. J’ai regardé les vidéos ; tu croirais voir Sarko. Aussi sûr de lui, aussi arrogant, aussi donneur de leçons... Il ira loin, ce petit !

             — Arrête tes citations !

             — T’as raison... N’empêche que la pédolâtrie sévit salement, outre Atlantique ! Shirley Temple, la « petite fiancée de l’Amérique » des années trente, a ouvert la voie à une pleïade d’enfants acteurs plus insupportables les uns que les autres, et aujourd’hui, Jonathan Krohn inaugure une nouvelle mode : les gosses politiciens... Je te parie que cette engeance va pulluler, dans les années à venir !

             — Tu crois qu’ils seront tous républicains ?

             — Je le crains. L’éthique démocrate est sûrement trop complexe pour des mômes... et pour les tordus qui les manipulent ! »

     


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                                      Mémé change de camp

     

             « Si on m’avait dit qu’un jour, j’aurais le cœur du côté des cathos... » grogne mémé Georgette.

             J’ouvre des yeux ronds.

             « Tu rigoles ou quoi ?

             — Tu te souviens des déclarations de notre cher président, en octobre 2007, après une rafle de sans-papiers chez les Emmaüs de Foulain, près de Dijon ? 

             — Euh... non.

             — En gros : peu importe l’identité de ceux qu’on recueille en centre d’hébergement. « Aide à personne en danger », ça s’appelle. Et il avait conclu par : « Toute autre politique est absurde et n’aura pas mon soutien ».

             — C’était plutôt sympa de sa part... Et alors ?

             — La semaine dernière, les flics ont récidivé. Perquisition aux Emmaüs de Pointe-rouge, près de Marseille. Photocopie des dossiers de tous les compagnons ayant des noms à consonance étrangère. Placement d’un d’entre eux en centre de rétention. Six heures de garde à vue pour Kamel Fassatoui, le responsable de la communauté, accusé d’héberger des immigrés en situation irrégulière....

             — La vaaache !

             — Comme tu dis ! En s’attaquant à cette institution qui résiste à l’inhumanité ambiante et refuse de céder au dictat de la paperasse, on prive des êtres en détresse de leur ultime recours.  Et pire : on cherche à changer l’aide humanitaire en auxiliaire de la police !

             — C’est du joli ! 

             — Bah, Éric Besson pousse bien le cynisme jusqu’à utiliser la fragilité des clandestins pour en faire des balances... En tout cas, moi qui suis anar jusqu’au fond des baskets, je le déclare solennellement : s’il ne reste que les cathos pour faire un bras d’honneur à ce putain de gouvernement vichyste, je veux bien devenir nonne !

             — Houlà ! C’est Siné qui va apprécier !

             — Ça ne m’empêchera pas montrer mon cul au pape, rassure-toi ! Ni de crier « croâ croâ » devant les églises. Il faut assumer ses contradictions, foi de mécréante  ! »


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                               Souriez, vous êtes fliqués !

     

             « Dire que, quand j’étais môme, ça me faisait rêver... soupire mémé Georgette.

             — Quoi, mémé ?

             — L’idée d’observer les faits et gestes d’autrui dans une boule de cristal ou un miroir magique.

             —  Comme dans les contes de fées ?

             —  Entre autres... Par la suite, la SF a largement exploité ce thème, et en particulier George Orwell, avec son célèbre « Big Brother », dictateur omnipotent qui contrôle ses sujets grâce à une caméra placée dans chaque foyer.

             — Mais... ce n’est pas un rêve, ça, c’est un cauchemar !

             — Qui menace de devenir une réalité : Michèle Alliot-Marie s’est engagée, en 2009, à multiplier par trois le nombre des caméras de surveillance dans les lieux publics. De 20.000, nous allons passer à 60.000. Coût de l’opération : 55 millions d’euros...

             — Je croyais qu’il fallait faire des économies !

             —Sur les hôpitaux, les écoles, les maisons de retraite, bien sûr ! Mais pas sur la sécurité — et les excès de flicage dont elle est l’alibi ! Un alibi d’autant moins convaincant que la Grande-Bretagne, qui a battu tous les records en truffant Londres de 500.000 caméras (une pour 14 habitants), fait aujourd’hui marche arrière. Ces ruineux gadgets n’ont permis de résoudre que 3% des délits de rue, à peine...

             — Pourquoi on accepte, alors ?

             — Parce qu’on est des moutons. Tu sais, la méthode Knock, qui consiste à convaincre les gens qu’ils sont malades pour leur fourguer de faux remèdes, a fait ses preuves !

             — Tu veux dire que l’insécurité dont on nous rebat les oreilles, c’est bidon ?

             — Je veux dire qu’investir 55 millions d’euros dans un appareil social adapté — maisons de jeunes, éducateurs spécialisés, foyers d’accueil, etc — serait certainement plus efficace (et plus humain), pour prévenir la délinquance, que leurs caméras à la con ! »

             Ben voyons ! Elle barbote encore en plein conte de fées, ma mémé ! 

     


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