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LE BEL ÉTÉ 49
MIROIR, MON BEAU MIROIR
Si, telle la Jézabel de Racine, je redoutais « des ans l’irréparable outrage », cette crainte, aujourd’hui, n’était plus de saison. Les signes que je traquais jadis dans mon miroir — cheveux gris, rides, ridules, coussinets sous les yeux, empâtement des hanches, des chevilles, de la taille —, semblaient bien anodins, comparés aux syndromes qui me frappaient depuis peu. Une vieille en bonne santé, c’est, ma foi, supportable, et ça peut même encore faire illusion. Une malade condamnée à plus ou moins court terme, non. Je repensais souvent à ces fleurs filmées en accéléré. L’on y voyait, hop, hop, naître et s’ouvrir le bourgeon, puis s’épanouir un à un les pétales avant l’altération finale (le tout — naissance, vie et mort — torché-bouclé en moins de dix secondes.)
— Comment peux-tu m’aimer dans cet état ? demandais-je à Castor.
Il riait.
— Je t’aimerais dans n’importe quel état, voyons.
Un ange, je vous dis !
Or, offrir à cet ange une face de pleine lune bouffie par la cortisone me navrait. Moi qui ai toujours nié la maladie — et, par conséquent, ses stigmates —, je me retrouvais, comme tous les cancéreux, marquée du sceau d’infamie de la chimio. En dépit de mes casquettes bardées de badges sympas, j’avais le sentiment d’incarner, de manière outrancière, la malédiction de l’époque. Un truc honteux, assez sale et repoussant, un peu comme la vérole au XIXème siècle. Mais Castor, qui était le seul à me voir tête nue, relativisait ces affres d’un sourire. Il trouvait même moyen d’ajouter que j’étais belle. Cette formule magique, en éloignant la farandole grimaçante de mes spectres, me rendait, un instant, ma chevelure luxuriante et mon intégrité physique. D’autant qu’elle se doublait forcément d’un baiser — autre exorcisme, et non des moindres.
J’émergeais donc de ses bras telle Vénus sortant de l’onde ; toute neuve à chaque fois.
Pour cela aussi — pour cela surtout —, ma reconnaissance lui est acquise à tout jamais.
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Commentaires
1RykoJeudi 19 Décembre 2013 à 10:20Répondre
En tout cas, je suis d'accord avec Gudule : Morano, je suis sûre que c'est interdit par les conventions de Genève un truc pareil. Comme les baïonnettes triangulaires, c'est assimilé à de la torture.
En tous cas, merci Flore, et pis Ryko. Je vais aller cacher ma rougitude ailleurs, ou me passer de la glace dessus. Une magnum avec pépites de chocolat, tiens.
Et merci à Gudule, ce concentré de bonheur sur pattes, qui ne se rend même pas compte à quel point elle est craquante.
A ne pas confondre avec Sarah Connor sous peine de risque de se prendre un pruneau...
@ Flore : après le coup du castor surpris dans ta maison, j'aimerais bien que Sarah biboche avec ma Gudule. Elle n'arrête pas de me cuisiner, tu sais.
Je te raconte même pas le cirque, si une photo d'un castor avec une mouette fuitait quelque part...
Sarah Lerait vachement par chez vous :)
Avec des câpres ? Oui, les câpres... Sarah pèle sûrement quelque chose au Castor.
Aïe. J'avais dit que j'arrêtais. Bouhouhou. J'ai honte.
M'enfin, aidez moi ! Allo Centre Anti Sarah Service ?...
Plus que 5 minutes et Sarah semble son matos et va se coucher. Craché-juré-ptoui !46Pata lVendredi 29 Août 2014 à 13:2947OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:29
("Ma mère Jézabel devant moi s'est montrée,
Comme au jour de sa mort pompeusement parée.
Ses malheurs n'avaient point abattu sa fierté;
Même elle avait encor cet éclat emprunté
Dont elle eut soin de peindre et d'orner son visage,
Pour réparer des ans l'irréparable outrage.")
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