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GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE 103
Impasse Florimont
Nous venions d’arriver en France quand, en lisant un article sur Brassens, j’apprends qu’il habite impasse Florimont, derrière la gare Montparnasse. Or, non seulement c’est mon idole depuis toujours, mais je caresse l’ambition d’écrire, moi aussi, des chansons. Avec Alex, nous nous sommes essayés à la chose. Il met mes poèmes en musique et on les interpète en duo. C’est tendre, un peu vieillot, mais ça plait aux copains, et moi, j’y crois à fond. J’ai juste besoin que quelqu’un du « milieu » me donne un p’tit coup de pouce. Pourquoi pas le grand Georges, qu’on dit attentif aux nouveaux talents ?
Un matin, donc, j’embarque mes loupiots de trois et six ans dans le métro. On traverse tout Paris et, portant l’un, traînant l’autre, je parviens, sous une pluie battante, à la fameuse impasse. Le cœur houleux, je sonne ; pas de réponse. Je re-sonne, idem. Le Maître des lieux est absent... Qu’importe, j’ai tout prévu. Je sors mes manuscrits de leur sac en plastique, j’y adjoins la lettre écrite au cas où, et je glisse le tout sous le portail métallique qui ferme la propriété. Puis je m’en retourne chez moi, avec mes gosses et mon espoir.
Espoir déçu, hélas. Les semaines passent sans m’apporter aucune nouvelle. Force est de me rendre à l’évidence : le Maître n’en a rien à cirer de mes œuvrettes. Encore une illusion qui se fait la malle.
L’ai-je maudit, le pauvre homme ! L’ai-je traité de tous les noms, en mon for intérieur ! J’ai même cessé d’écouter ses disques, c’est dire ! Jusqu’à ce que j’apprenne incidemment qu’il n’abitait plus là depuis quatre ans. Coup de bol, si on y pense. Car imaginons qu’il ait lu mes textes, les ait aimés et m’ait ouvert les portes du chaud-bizz — c’est juste une supposition, hein !—, je serais peut-être devenue parolière, qui sait ? Je n’aurais jamais écrit ni romans, ni nouvelles, et je ne serais pas là, sur mon blog, en train de vous raconter mes histoires à la con. A quoi tient le destin, quand même !
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Commentaires
1Aline MéchinVendredi 30 Mars 2012 à 21:25Répondre
Et de tes histoires à la c... m'enfin, Gudule ?3OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:484guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:48
@ Odomar : Je suppose que c'est ainsi que ça s'est passé. De toute façon, il fallait être fort naïve pour s'imaginer qu'il suffit d'apparaître (avec ses deux lardons) pour que plink ! le miracle se produise. Par la suite, j'ai appris à me méfier des rêves de ce genre.
@ Castor : J'ai toujours pensé que les déconvenues étaient comme le rebord du billard. Tu rebondis dessus, et c'est reparti dans une autre direction. Meilleure ? Moins bonne ? Alors là... qui peut en juger ?
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