• vos gueules les mômes n°36

              

                                     Une cellule et un cœur

                                    

             « Enfin une bonne nouvelle ! sourit mémé Georgette.

             — Quelle nouvelle, mémé ?

             — Dans une prison du Lot-et-Garonne, deux détenus pacsés partagent la même cellule.

             — Comment ça ?

             — Ils se sont rencontrés en cabane, se sont aimés, et, en août 2008, ont demandé à être pacsés. Dans la mesure où ils partageaient une adresse commune — condition sinéquanone à cette formalité — , ça leur a été accordé. Et du coup, leur cellule est devenue un p’tit nid d’amour.

             — Des taulards heureux... On aura tout vu !

             — Ouais, et je peux te dire que ça ne plaît pas à tout le monde ! À commencer par Annie Gourgue, présidente de l'association de victimes La Mouette, à Agen. « Si on permet à ces gens une vie sexuelle épanouie, comment voulez-vous que les victimes et les familles puissent être apaisées ? », s’indigne-t-elle.

             — Sympa, la dame !

             — La loi du talion, ça s’appelle. Un reste de barbarie dont nous ne somme pas près d’être débarrassés. Pour que la morale soit sauve, le monde carcéral doit être un enfer — et de fait, il l’est.

             — T’exagères !        

             — À peine ! Dans les prisons française, on dénombre grosso-modo un suicide tous les trois jours, c’est-à-dire sept fois plus qu’en milieu libre. Une augmentation de 200% au cours des vingt dernière années... Mais pour en revenir à nos tourtereaux, souhaitons que leur exemple fasse bouger les choses !

             —  Bouger dans quel sens ?

             — « Dans une France pénitentiaire où la sexualité reste un tabou, cette union est tout un symbole, a déclaré Elsa Dujourdy, juriste à l’OIP (Observatoire international des prisons pour le Sud-Ouest). Quitte à lancer un débat miné, entre gêne morale et vraie question de société. »

             — Ce qui signifie ?

             — Qu’il y a peut-être là l’amorce d’une réflexion sur l’un des aspects le plus inhumains de la détention...

             — L’amour, tu veux dire ?

             — Ach, oui, ma fille : l’amour... Touchours l’amour ! »

     

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