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grands moments de solitude 177 (tome 2)
L'ardente maîtresse
Monestier, le proprio de Marraine, avait une maîtresse. Je le savais parce qu’un jour, en croisant une grosse dame dans les rues de Stavelot, ma copine Nicole m’avait dit : « Tiens, voilà la maîtresse de monsieur Monestier ! »
— Il va encore en classe, à son âge ? m’étais-je naïvement étonnée.
— Pas une maîtresse d’école, andouille ! Une maîtresse tout court. Tu ne sais pas qu’une sale femme qui fait zig-zig avec un homme sans être mariée, c’est sa maîtresse ?
J’en pris bonne note. En fait, cette révélation tombait à point nommé pour résoudre un mystère qui me tarabustait depuis le début des vacances. Car, bien que sa maison soit louée, M. Monestier y habitait toujours. Il avait gardé son ancienne chambre, devenant, en quelque sorte le colocataire de ses locataires. Or, chaque dimanche matin, la grosse dame débarquait après la messe, et ils s’enfermaient dans cette pièce minuscule, les volets clos même quand le soleil brillait.
Parole d’honneur, je n’aurais pas aimé être à leur place !
Un jour, n’y tenant plus, je demandai à Marraine :
— Qu’est-ce que qu’ils font, dans la chambre, monsieur Monestier et la grosse dame ? Ils s’embrassent, tu crois ?
Elle eut un sourire attendri.
— Tes parents, que font-ils, le dimanche après-midi ? répondit-elle.
— Ben… la sieste, en général. Et des fois, papa lit son journal pendant que maman tricote.
— Eh bien, eux, c’est pareil.
Imaginez ma déception ! Toutes mes illusions s’envolaient d’un coup. C’était bien la peine d’avoir une maîtresse (une sale femme qui faisait zig-zig sans être mariée) pour s’ennuyer autant que papa et maman !
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