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vos gueules les mômes n°47

 

                            La culture avec un grand cul

 

                          Prévert doit se retourner dans sa tombe !

 

         « Vaut mieux entendre ça qu’être sourde, soupire mémé Georgette.

          — De quoi tu parles, mémé ?

          — Tu sais ce que Frédéric Mitterand a sorti, à propos de la loi Hadopi 2 ? « C’est notre devoir de lutter contre les chauffards de l’internet. »

         — Qu’est-ce que ça veut dire ?

         — Rien, c’est un mot d’auteur. Le genre de phrase creuse qu’on trouvera peut-être, d’ici cinquante ans, dans un dictionnaire de citations, et dont les amateurs du genre se gargariseront. Mais ce n’est pas le pire.

         — Ah ?

         — Non, il a ajouté : « Je ne veux pas qu’on traîne dans le caniveau des pirates l ‘atmosphère atmosphère d’Arletty, le c’est dégueulasse de Jean Seberg dans « A bout de souffle », la biscotte de Michel Serrault dans « La cage aux folles ».

         — C’est quoi, ces trucs ?

         — De merveilleux moments de cinéma auxquels « le caniveau des pirates » justement (bonjour la métaphore foireuse !) évitera peut-être de sombrer dans l’oubli. Les œuvres de Renoir, Prévert, Carné et autre Duvivier doivent rester, selon Frédéric Mitterand — en tout cas, c’est ce qui ressort de sa déclaration — l’apanage d’une élite (prononcer eylite, la bouche en cul de poule). Un truc de ciné-club, de cinémathèque, de musée, c’est-à-dire de mouroir. Pour qu’un film reste vivant, il doit être vu par le maximum de gens, y compris et surtout les jeunes générations, ce n’est pas Bouyxou qui me contredira. Internet nous offre une chance inouïe : mettre ces petits bijoux à la portée de tous. Permettre aux plus modestes de les (re)découvrir. Ressusciter, dans nos cerveaux saturés d’effets spéciaux venus d’outre-Atlantique, le discours Front popu d’un Gabin, la gouaille anarchiste d’un Bubu, la bonhommie caustique d’un Michel Simon, l’humour acide d’une Pauline Carton...

         — Qui c’est, ces gens ?

         —  Des marchands de rêve qui se sont battus pour faire du cinéma un divertissement populaire, et sont, aujourd’hui, pris en otages par notre nouveau ministre de la Culture (avec un grand cul) ! »

 

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