Contrepoison
À chaque fois qu’Adèle éprouvait un désir d’enfant, elle faisait appel à mes services. C’est-à-dire qu’elle m’empruntait les miens, d’enfants, histoire d’expérimenter « sur le tas » les grandeurs et les servitudes de la maternité. Cela m’arrangeait, pensez ! D’autant qu’entre elle et eux, le courant passait bien : elle préparait les meilleures crêpes au Nutella du monde et savait se libérer au moment opportun (genre salon d’Angoulême, par exemple).
Or, justement, cette année-là, pour Angoulême, elle avait assuré comme une bête : programme télé d’enfer, DVD et BD retenus d’avance à la médiathèque. Frigo plein à craquer ; bref, de quoi concocter d’inoubliables souvenirs à ma progéniture. Les gamins étaient fous de joie. Pourquoi a-t-il fallu que je tombe malade la veille du départ ?
Bon, pas le choix, je reste près de mes mômes ; Alex part en célibataire et Adèle rentre chez elle avec son p’tit mari sans avoir fait son stage de mère intérimaire. Résultat : deux mois plus tard, elle m’apprend la bonne nouvelle : une grossesse-surprise mise en chantier ce soir-là précisément. (à défaut de films d’horreur, fallait bien qu’elle s’occupe, pauvre louloute !)
Théo, si jamais tu lis cette Solitude, sache que tu dois la vie à un virus de gastro vieux d’une trentaine d’années. Tout le monde ne peut pas en dire autant !