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ZOÉ BORBORYGME
Episode 80
Résumé des chapitres précédents : L’homme a la bite verdâtre est, en réalité, un être hybride, formé d’un tas de petits bouts disparates. Le docteur Branquestein semble très épris de son bras droit, indéniablement féminin.
Zoé ne pouvait détacher ses yeux de l’hallucinant spectacle. À l’évidence, un sentiment très fort unissait le médecin et sa créature. De quelle nature était-il ? C’est ce que notre héroïne aurait aimé savoir... Mais comment arracher leur secret à ces deux êtres étranges ?
« Ne plus les quitter d’une semelle » fut l’unique réponse qui lui vint. Dès lors, elle décida de hanter les lieux à leur insu.
Ainsi débuta une filature qui devait durer toute la journée. Aussi discrète qu’une ombre, Zoé s’insinuait dans les replis des rideaux, s’accroupissait sous les tables, se tapissait derrière les meubles et les fauteuils, afin de jamais perdre les deux hommes de vue. Elle put donc suivre, minute après minute, heure après heure, leurs activités — fort banales, au demeurant : repas, infos télévisées, café, sieste, petite promenade dans le jardin, apéro, dîner au son d’une musique douce, le tout orchestré par les monologues insipides du médecin qui tenaient lieu de conversation...
« Je plains les détective privés, se disait-elle, un peu déçue du résultat. On s’imagine toujours que leur job est palpitant, mais en réalité, c’est d’un ennui ! »
Vint enfin le soir.
— Si nous allions dormir ? proposa Branquenstein. Je tombe de sommeil.
« Enfin, un peu d’animation », pensa Zoé.
Profitant de la toilette de ses hôtes, elle se glissa dans leur chambre. Par chance, un placard à claire-voie faisait face au lit. Elle s’y tapit et, de ce poste d’observation privilégié, put les épier tandis qu’ils se couchaient.
Première et indéniable constatation : le chirurgien et sa créature étaient amants. Mais de manière assez particulière, puisque seul le bras prénommé Dora semblait exciter la libido de Branquenstein. Pour le reste, il se comportait plutôt en père envers celui qu’il appelait « Chouchou », et ce dernier s’en contentait. Il lui laissait utiliser Dora avec indifférence, comme si ce membre était indépendant de sa personne. Et, tandis que son compagnon flirtait éhontément avec les doigts gracieux, il lisait ou comptait les mouches, au plafond. Jamais il ne manifesta un intérêt quelconque pour les ébats manuels auxquels il se prétait mais qui, visiblement, ne le concernaient pas.
— Je t’aime, je t’aime... ânonnait le toubib dans le feu de la passion. Serre mieux les doigts, s’il te plaît... oui, comme ça... Accélère le mouvement... Non, là, tu me fais mal ; plus souple le poignet !
Bien que ce spectacle, de par sa maladresse, éprouvât les nerfs d’une trayeuse professionnelle, Zoé ne broncha pas. L’heure n’était point aux jugements de valeur mais à l’observation. Et celle-ci, toute laborieuse qu’elle fût, s’avérait bougrement instructive...
(A suivre)
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Commentaires
1Benoît BarvinMardi 16 Octobre 2012 à 08:53Répondre
Quand est-ce que Zoé va s'occuper brillamment du reste de son anatomie ?6GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:417GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:418guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:41
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