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vos gueules les mômes n°17
VOS GUEULES, LES PUBS !
C’était l’autre matin. Je prenais mon p’tit déj’.
« Y a plus de Banania ? », j’ai demandé à mémé Georgette.
Elle m’a lancé un drôle de regard, en secouant négativement la tête.
« T’en rachètes quand ?
— Jamais. Je ne veux pas d’un produit qui doit tout son succès à un slogan raciste.
— Tu veux parler de « Y a bon Banania » ? Mais c’est fini, ça ! Ce n’est même plus marqué sur les boîtes !
— Encore heureux : l’ignoble petite phrase a disparu en 2006, suite à l’assignation, par un collectif antiraciste, du propriétaire de la marque devant le Tribunal de Grande Instance.
— Ah, tu vois bien !
— Le problème, c’est qu’il ne suffit pas d’interdire un slogan publicitaire aussi célèbre pour qu’il disparaisse du jour au lendemain.
Ce symbole du colonialisme sévira encore longtemps dans le langage quotidien, crois-moi ! On le trouve même en toutes lettres dans la presse de gauche !
— Mais c’est de l’humour !
— Ouais, de l’humour, bien sûr… Un humour qui faisait rire en 1915, quand on envoyait les tirailleurs sénégalais se faire dégommer, en première ligne… Et en 1931, à l’expo coloniale, où l’on exhibait les Africains comme des singes… Et qui continue, encore aujourd’hui, à véhiculer l’image d’un peuple débile, style Tintin au Congo ! Cet humour-là, petite, je lui pisse à la raie ! Sais-tu ce que disait Léopold Sedar Senghor ? « Je voudrais déchirer le rire Banania sur tous les murs de France »…
Ah là là, voilà encore mémé qui monte sur ses grands chevaux !
« Pfff, faire un foin pareil juste pour de la pub…
— La pub est le reflet de notre société ; elle n’a pas son pareil pour formater les têtes ! Et outre le fait qu’elle détermine, à notre insu, la plupart de nos choix de consommateurs, elle est un vivier de lieux communs et d’idées reçues. Ça ne te suffit pas, comme raisons ? »
Et elle conclut dans un soupir :
« Trois raisons de boire Contrexéville ! »
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Commentaires
"Et je déchirerai le rire Banania sur tous les murs de France" écrivait Senghor *********
Décidément je l'aime, Mémé Georgette.
Mémé Georgette, elle est plus forte que Tartine Mariol : elle a le droit de dire des gros mots.