• ROSE 115

    ETIENNE

     

    — Moi, j'en connais un qui va être content, glousse la tante Ida tandis que les enfants barbotent dans la baignoire-à-pattes-de-lion — qui fascine Grégoire  comme elle avait jadis fasciné sa mère.

             Rose rosit.

    — Il vit toujours chez ses parents ? s'étonne-t-elle, interrompant le va-et-vient mousseux du savon sur le gant de toilette.

    — Oui.

    — Il n'est pas marié, alors ? Ni fiancé ?

    — Non, et à mon avis, ce n'est pas demain la veille.

    — Pourquoi ?

    Petite moue complice :

    — Tu ne t'en doutes pas ?

    — N'importe quoi, balbutie Rose, troublée malgré elle.

    — Il était très amoureux, tu sais. Et ce n'est pas le genre à changer de sentiment comme de chemise.

    Rose éclate de rire. Un peu trop fort. Puis embrasse sa tante. Un peu trop vivement.

    — C'est si bon d'être ici, près de toi.

    — J'en ai autant à ton service, brigande.

    — Oh, tata… il y a au moins dix ans qu'on ne m'avait pas appelée comme ça.

             — Il y a au moins dix ans que tu n'étais pas venue au Thier-à-Liège.

    C'est, à peu de chose près, la vérité vraie. Au sortir de l'école primaire, Rose avait perdu le goût de ces vacances champêtres qui enchantaient sa petite enfance, leur préférant la mer ou les voyages, en compagnie de ses parents. D'autant que, absorbée par son mari dont la santé chancelante réclamait des soins constants, Ida était moins disponible qu’avant. Et que sa sœur "se refusait à lui donner un surcroît de travail".

    Rose, soudain émue, hoche la tête :

    — J'avais oublié quel plaisir c'était.

    — Moi pas.

    Elles se regardent, se sourient. Rose sent l'émotion l'envahir.

    — C'est bête, hein, tout ce temps perdu, dit-elle d'une voix rauque.

    — Il n'est jamais trop tard pour le rattraper, surtout si vous vous y mettez à trois, n'est-ce pas, la marmaille ? Vous êtes contents d'être chez tante Ida ?

    — Ouiiiiiii, claironne Grégoire, en agitant les pieds dans l'eau — ce qui éclabousse son frère, au grand dam de ce dernier.

    S'ensuit une bagarre en bonne et due forme que leur mère interrompt d'un énergique :

    — Stooop ! Si on se dispute, pas de crème au chocolat !  

    Réaction d'Ida :

    — Ce que tu es sévère ! Il faut bien qu'ils se détendent, ces chérubins.

    Rose en a le cœur gonflé de reconnaissance.

     

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Samedi 26 Avril 2014 à 00:40
    Annie GH
    Rose nous fait des vrais "chaud et froid"…
    Le changement d'ambiance est flagrant et cela réchauffé le cœur de ces quatre-là…
    2
    Samedi 26 Avril 2014 à 05:55
    Gudule
    Ben ouais, mais la tante Ida, quoi.
    3
    Vendredi 2 Mai 2014 à 19:24
    Pata
    En fait les bambins ont expérimenté la méthode utilisée par les forces de police... Ils ont connu le méchant flic et vont maintenant pouvoir se détendre avec le gentil !

    Comme quoi, justice et éducation peuvent parfois se rejoindre ;)
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    4
    Samedi 9 Août 2014 à 06:36
    Gudule
    Optimiste !
    5
    Pierre-Yves Delarue
    Vendredi 29 Août 2014 à 13:26
    Pierre-Yves Delarue
    Page souvenirs, page tendresse, j'aime bien aussi...
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