• HISTOIRES DE COWBOYS 5

     

     

     

                                            ATTENTION, UN DUEL PEUT EN CACHER UN AUTRE ! 

     

             Une chaleur torride écrasait Bingbang-city. Pas un souffle de vent dans l’air surchauffé. Pas un bruit. À l’abri des volets fermés, la population, attentive, guettait...

             Et que guettait-elle ?

             Le duel qui se préparait, dans l’aveuglante lumière de midi.

             Deux silhouettes noires se faisaient face, sur la place déserte. Celles de Bill Longs-cils et de Jessie Gratteprout, prêts à en découdre pour une quelconque broutille. Le premier était le tireur le plus rapide de l’Ouest, le second collectionnait les cadavres comme si c’étaient des timbres ou des autocollants. De belles crapules, en vérité...

             Sûr, ça allait saigner !

             — J’aurai ta peau, coyote, gronda Bill Longs-cils d’une voix sourde.

             — Tu feras moins le fier quand je t’aurai troué le bide, répliqua Jessie Gratteprout du tac au tac.

             Quelques notes plaintives ponctuèrent leurs paroles. Dans l’ombre du saloon, Old Frog jouait de l’harmonica.

             Insensiblement, les mains des deux outlaws se dirigeaient vers la crosse de leurs colts. D’une seconde à l’autre, les armes allaient parler...

             Tous les spectateurs retinrent leur souffle quand la musique s’arrêta. L’instant décisif était arrivé.

             Ce fut alors qu’un cri s’éleva dans le silence :

             — Papaaaaa !

             D’une maison voisine surgit un petit garçon, brandissant un paquet de mouchoirs en papier.

             — Papaaa, gn’ai le nez qui couuule !

             Bill Longs-cils battit des paupières d’un air égaré.

             — Excuse-moi, dit-il à son adversaire. Ma femme est absente, faut que je m’occupe du gamin.

             Quelques murmures désappointés fusèrent d’un peu partout. Jessie gratta sa barbe de trois jours et péta (il faisait toujours ça quand on le contrariait, d’où son surnom).

              Ayant soigneusement mouché son fils, Bill le renvoya chez lui avec un gros bisou. Puis il reprit la pose et se re-concentra.

             Jessie en fit autant. Les chuchotements se turent, et le chant de l’harmonica s’éleva à nouveau.

             — Tu peux numéroter tes abattis, vermine, lança Bill Longs-cils, l’expression mauvaise.

             — Cause toujours, ironisa Jessie Gratteprout. Tu seras moins bavard quand je t’aurai expédié six pieds sous terre ! 

             Sans se lâcher des yeux, ils esquissèrent un pas en avant. Dans une fraction de seconde, ils allaient dégainer. La tension était à son comble, lorsque soudain...

             Le sol se mit à trembler.

             D’un même geste effaré, les deux hommes se tournèrent vers l’horizon. Un nuage de poussière, accompagné d’un grondement de tonnerre, se rapprochait à toute vitesse.

             — Un troupeau de bisons ! cria Bill.

             — Sauve qui peut ! hurla Jessie.

             Il se jeta à plat ventre sous l’abreuvoir, tandis que son adversaire plongeait dans un tonneau d’eau de pluie. Juste à temps : la horde en folie déferlait sur la ville, détruisant tout sur son passage.

             Le cataclysme ne dura que quelques minutes. Mais quelles minutes !  Quand le sable soulevé par la course effrénée des bisons fut dissipé, les rues de Bingbang-city ressemblaient à un champ fraîchement labouré.

             Bien que perturbés par cet événement, nos duellistes se remirent en position de combat.

             Les spectateurs se réinstallèrent derrière leurs volets.

             Et, avec un soupir de lassitude, Old Frog re-souffla dans son harmonica.

             — Fais tes prières, cafard, car  ta dernière heure a sonné, émit Bill Longs-cils d’une voix incertaine.

             — Que le diable t’emporte, repartit Jessie Gratteprout. Et salue-le de ma part quand il te cramera les fesses !

             Ils saisissaient leurs révolvers quand, tout à coup... 

             Un truc dégringola du ciel dans l’espace qui les séparait, bleum ! Ils bondirent en arrière, et un « Oh ! » général éclata. Le « truc » était rond, bombé, de couleur gris métallisé, et couvert de  petites lumières clignotantes.

             — Qu... que... qu’est-ce que c’est que ça ? bégaya Bill Long-cils, en comprimant les battements de son cœur.

             — U... une soupière géante ? suggéra Jessie Gratteprout, aussi éberlué que lui.

             Tandis qu’ils parlaient, l’engin s’entrouvrit et deux petits hommes verts en sortirent. Ils paraissaient très énervés et poussaient des cris suraigus en s’adressant mutuellement des signes de menace.

             En fait, ils s’engueulaient.

             Grave.

             Sans prêter attention à ce qui les entourait, ils gagnèrent le centre de la place. Et là, l’un face à l’autre, il sortirent on ne sait d’où des désintégrateurs, se tirèrent dessus, et pfuit ! s’évaporèrent. 

             Il y eut un moment de stupeur que Bill et Jessie, d’un commun accord, mirent à profit pour s’engouffrer dans la soucoupe et décoller.

             — Où allez-vous ? leur crièrent les habitants de Bingbang-city, médusés.

             — Sur une autre planète, répondit Bill Longs-cils

             — Là où nous pourrons enfin nous entretuer en paix, ajouta Jessie Gratteprout.

             On ne les revit jamais.

            

     

     

    Petite leçon d’anglais :

    Outlaw = hors-la-loi

    « histoires de cow-boys 4 »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 19 Décembre 2014 à 00:01

    Mais c'est quoi ce monde de merde où on peut même pas s'entretuer en paix, hein ? (notons qu'il a largué le chiard et sa morve, quand même...)

    2
    Mardi 25 Août 2015 à 11:31

    Hé, ben ! Quand Sergio Léonne rencontre Steven Spielberg !

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