• grands moments de solitude 68 (tome 2)

     

                                                               L'invité

     

            Après la mort de Sylvain, je me sentais bien seule dans ma grande maison. C’était l’hiver, il faisait froid, et dehors soufflait la tempête. Au bout de quelques semaines, transie physiquement autant que moralement, je propose à un copain en qui j’ai toute confiance de venir me tenir compagnie. Ce qu’il accepte sans hésiter.

             Ma chambre d’ami comporte deux lits : l’un, vaste et confortable, l’autre, à la taille d’un enfant. C’est, bien entendu, le grand que je lui destine.

             Après une soirée, ma foi, bien arrosée, nous allons nous coucher, chacun de son côté. Pas question que Michel (c’est le nom du copain), abuse de la situation : ce n’est pas son genre. Galipetter lors d’une veillée funèbre est un privilège réservé à Brassens, et encore : uniquement en chanson.

            

             Mais c’est compter sans « le petit galopin de nos corps* » qui, cette nuit-là, vient me tarabuster intempestivement. Bien que je grelotte dans mon lit glacé, la présence d’un homme à l’étage en-dessous me donne des suées. Plonger dans ses bras, je ne pense qu’à ça. Impossible de dormir dans ces conditions. Je me tourne et me retourne sous ma couette en imaginant, dans tous les détails, une scène qui me fait honte mais que je n’arrive pas à chasser de mon esprit.

             Alors, bon, finalement, je craque.

             Je me lève, enfile un peignoir, et, sur la pointe des pieds, gagne le rez-de-chaussée. Ô joie ! sa porte est entrouverte. Le cœur battant à tout rompre, je me glisse dans la pièce et, à la lueur de la lune, m’approche du grand lit.

             Vide !

             Avec un feulement de surprise, je me retourne.

             Michel dort, tout ratatiné, dans le petit lit. Durant un bref instant, la tentation de le rejoindre me tord le bide, mais il n’y a vraiment pas place pour deux. D’ailleurs, le message est clair ; passer outre serait du plus mauvais goût.

             En ruminant ma déconvenue, je remonte donc dans ma chambre, le plus discrètement possible. Mais, dès le lendemain, je somme mon invité de prendre le grand lit.

             Et là aussi, le message est clair.

     

                                * Merci à Yves Navarre pour la si jolie expression

     

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  • Commentaires

    1
    Samedi 1er Août 2015 à 12:20

    ********* 

    2
    Samedi 1er Août 2015 à 13:46

    :)

    Ça fait plaisir, j'ai l'impression de retomber sur un souvenir heureux... Bon ce souvenir n'est pas le mien mais vous êtes sacrements partageurs tout les deux !

     

    Oui, comme Boudune, plein d'étoiles, dans mes yeux ^^

    3
    Dimanche 2 Août 2015 à 18:48
    4
    Lundi 3 Août 2015 à 17:34

    Inutile de siffloter d'un air détaché, tillon. Je t'ai reconnu en lisant la présente;-)

     

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    5
    Lundi 3 Août 2015 à 18:59

    Damenède ! T'es trop forte, Boubou !

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