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GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE 23
Lulu Panty
Avril 1982. Dargaud rachète Charlie mensuel et sollicite Siné. Ce dernier, qui n’a jamais fait de BD, me propose de devenir sa scénariste, ce qui donne naissance à Lulu Panty, petite bonne femme rigolote, féministe, mauvais genre, et fervente adepte du porte-jarretelles.
Durant trois numéo (du 2 au 5 de la nouvelle formule), on s’amuse beaucoup, Bob et moi. Sur deux pages contenant chacune cinq strips de quatre cases, Lulu vit des aventures rocambolesques, commente l’actualité, lance des pavés dans la mare, énonce des aphorismes provocateurs... Mais pas trop, hein ! Juste ce qu’il faut pour faire marrer le lecteur sans être jamais vulgaire (à notre avis, du moins). Hélas, lorsque Siné apporte les pages du numéro 6 :
—Désolé, on arrête, lui dit le rédacteur en chef. L’agent de Schulz nous a mis le marché en main : c’est toi ou lui. Et comme « Les Peanuts » est la série vedette du journal...
Siné, estomaqué, demande de plus amples explications.
— Schulz est choqué par l’obscénité (!) de ton personnage, lui est-il répondu. Il refuse que son nom soit associé, d’une quelconque manière, à ta production.
Comme ça se passe pendant mes vacances en Corse, j’apprendrai la chose par un article virulent de Delfeil de Ton, dans le Nouvel Obs. Mais à quoi bon pester — ou même faire amende honorable ? Face au géant d’outre-Atlantique, Bob et moi ne faisons pas le poids. Exit Lulu Panty, longue vie à Charlie Brown.
Et on s’étonne que je fasse de l’antiaméricanisme primaire ?
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Commentaires
En 2011, le procès aurait tourné autrement, bien sûr, à moins qu'il ait pris des cours d'auto-dérision chez Gudule.4guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:50
Ce bon monsieur Schulz, dont, au demeurant, les personnages sont s, n'en était pas à son coup d'essai. Courant 70, une dame (dont j(ai oublié le nom) ayant publié un mémoire sur lui, dans lequel étaient incluses de parodies ses BD réalisées par les dessineux les plus talentueux du moment, a été traînée en justice. J'étais au procès, où maître Kiejman, qui la défendait, a basé toute sa plaidoirie sur le fait que cet humoriste n'avait aucun humour. je me souviens que nous avons beaucoup ri. Et que Schulz a perdu son procès. J'ignore s'il en serait de même aujourd'hui...5guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:506guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:507OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:50
Les Etats-Unis sont un pays puritain dont le sport favori est la chasse aux sorcières (au sens propre du temps de Salem, au figuré à l'époque maccarthyste). L'attitude de Schulz rejoint celle des juges traquant Polanski, des femmes de chambre syndiquées hurlant contre DSK, et... de FaceBook qui censure la moindre image de nudité.8guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:50
Parfaitement d'accord avec toi en ce qui concerne ce dangereux puritanisme qui, de plus en plus, déteint sur nous. Il suffit de voir les commentaires des internautes, concernant les événements que tu cites, pour se rendre compte qu'ici aussi, les mentalités sont en train de changer. Le déferlement culturel américain n'y est sans doute pas étranger...
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Etrange que Schultz s'offusque d'une bande dans Charlie Mensuel où on en voyait de toutes les couleurs, alors qu'il pouvait être publié sans problème chez Mickey. J'espère qu'il s'est racheté un second degré depuis, à moins qu'il ait demandé à illustrer la bible avec Crumb.