-
GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE 225
Je ne serai jamais Mazo de la Roche
En 2002, à la demande de mon éditrice de chez Grasset — et d’une lycéenne enceinte jusqu’aux dents rencontrée à l’île de la Réunion —, je réécris mon premier livre, « Et Rose elle a vécu », en direction des adolescents. Travail à la fois éreintant, car il me replonge dans un épisode difficile de ma vie, et exaltant, puisque remettre au propre un texte déjà écrit est toujours un plaisir. Ainsi naît « La vie en Rose », titre dont je suis très fière bien que personne ne semble comprendre le jeu de mots (c’est une histoire de grossesse, allez, faites un effort !). Le livre est si bien accueilli, tant par le public que par la presse, que ça m’incite à lui donner une suite... et même plusieurs. « Soleil Rose », paraît en 2003, puis « La Rose et l’Olivier », l’année suivante. L’éditrice adore, des messages de lectrices enthousiastes déferlent sur mon site, oh, punaise, cette fois, je crois que je tiens le bon bout...
Dans un état second, je m’attelle aux tomes 4 et 5, respectivement intitulés « Le Rose et le noir » et « Sous les pavés, la Rose » (ça se passe en mai 68). Bon, j’avoue : le récit s’éloigne de plus en plus de la réalité. Seuls les personnages et quelques anecdotes sont authentiques, mais ça fonctionne. Après tout, je suis romancière, pas biographe...
« Je m’en vais leur refaire Jalna, moi ! me dis-je avec délectation. Une saga à rallonge, comme celle de Mazo de la Roche ! »
Cette charmante illusion s’estompe brutalement lorsque j’apporte « Le Rose et le noir » à l’éditrice.
— Désolée mais je n’en veux pas, me déclare-t-elle, embarrassée. Ma direction refuse un quatrième volume. Une trilogie, d’accord, il y a des précédents, mais une série, ça fait vulgaire. C’est de la sous-littérature. Or, Grasset est une maison prestigieuse...
Bleum ! ni une ni deux, je dégringole de mon petit nuage, et m’en retourne chez moi, salement plombée. Force m’est d’expliquer aux lectrices, via mon site, qu’elles devront renoncer aux aventures de Rose. Ce qui provoque un tel tollé que l’une d’entre elles décide de lancer une pétition. Elle récolte une centaine de signatures d’adolescentes (oui, oui, tant que ça !) et même de quelques mères qui se sont prises au jeu. Réaction de l’éditrice :
— Gudule, tu peux demander à ton fan club de cesser de saturer ma boîte mail ? C’est agaçant, à la fin.
Et se retrouver avec, sur les bras, deux romans désormais impubliables, ce n’est pas agaçant, peut-être ?
-
Commentaires
1Benoît BarvinMardi 23 Octobre 2012 à 09:16Répondre
La vie en Rose est vraiment un excellent bouquin (je le sais, j'en ai refait la couv, hi hi), plein d'émotion, une solitude grandeur nature, comme tu le dis si bien.5guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:416guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:417guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:418guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:419OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:41
Comme par exemple La Comédie humaine, Les Rougon-Macquart, ou Les Hommes de bonne volonté ???10guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:4111NadegeVendredi 29 Août 2014 à 13:41
Ajouter un commentaire