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GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE 204
Echec et mat
Je n’ai jamais aimé les voyages. Hors de leur territoire, les bêtes se sentent en danger ; je ne fais pas exception à la règle. Mais bon, cette année-là — 87, si ma mémoire est bonne (ou 88 si elle ne l’est pas) — Sylvain m’entraîna en Equateur où il avait longuement vécu, ado. Un pélerinage, en quelque sorte. Une manière comme une autre de m’inclure dans son passé... Ça ne se refuse pas !
Nous débarquons donc à Quito, direction le Gran Casino, un hôtel pour routards d’un beauté prodigieuse, presque entièrement à l’abandon — ce qui justifie son prix modique. Sylvain, qui parle couramment l’espagnol, se lie aussitôt avec un client de passage, dreads, pantalon afghan, tongs, sac à dos. Une chance : ils sont tous deux férus d’échec et un jeu traîne sur le bar.
Tandis qu’ils « poussent le bois » en sirotant des Cuba Libre, je m’ennuie. Ce qui me vexe. Je n’ai pas fait douze heures d’avion pour rester plantée dans un patio, fût-il charmant. Si je partais en exploration ? J’ai remarqué, en venant, des escaliers qui montent au sommet de la ville, dominée par une gigantesque Vierge ailée. De là-haut, on doit avoir un point de vue fabuleux.
— Je vais faire un tour, dis-je à Sylvain.
Il lève distraitement la tête.
— Ah ? Où ça ?
— Voir la statue.
— Je vous le déconseille, s’immisce son partenaire, dans un français plus qu’approximatif. Il y a beaucoup d’agressions.
— Il a raison, approuve Sylvain, avant de replonger dans son jeu. Patiente cinq minutes, je finis la partie et on y va ensemble.
Docilement, je me rassieds, commande une autre conso. Attends un quart d’heure, vingt minutes... La partie s’éternise. Au bout d’une demi-heure, je prends la mouche et me casse. Mais en sortant de l’hôtel, je me heurte à un couple qui vient en sens inverse.
— On s’est fait dépouiller, expliquent-ils, hors d’eux. Des mecs nous on piqué nos sacs, notre argent, nos appareils photos, nos montres...
— Et même ma boucle d’oreille, gémit la fille. Regardez : ils m’ont déchiré le lobe en l’arrachant !
— Où est-ce arrivé ? s’enquiert Sylvain, tandis que l’hôtellier appelle la police.
— Dans l’escalier qui mène à la statue. C’est un vrai coupe-gorge ! On a bien failli y laisser notre peau...
Oh, punaise, je l’ai échappé belle !
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Commentaires
1Benoît BarvinMardi 11 Septembre 2012 à 07:42Répondre
A moins qu'il y ait parmi eux des amateurs de salopettes HoshKosh, je pense que tu ne risquais pas grand-chose.
Je rigole, hé hé.
Si Sylvain et son partenaire avaient fait un blitz, vous seriez aller vous faire dépouiller tous les deux. Merci, les échecs.3GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:424NadegeVendredi 29 Août 2014 à 13:425GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:42
N'empêche, j'aurais pas aimé me faire agresser !6OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:427OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:428guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:429guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:42
http://www.banrepcultural.org/blaavirtual/todaslasartes/ext/ext10.htm10guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:4211OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:4212GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:42
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