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GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE 17
Embrasse-moi, idiot !
Peu de temps après le pénible épisode qui précède, je me rends au musée de Gaillac, voir une exposition des œuvres de Camille Claudel. Ma copine Julia m’accompagne. On descend dans la crypte du musée, aménagée pour l'occasion, on regarde, on admire, on commente, lorsqu'un monsieur d'une cinquantaine d'années s'adresse à nous :
— Il y a une projection de diapos dans la salle voisine. Je vous conseille d'y assister.
Et là, je tombe en arrêt. Car ce monsieur n'est autre — du moins en suis-je persuadée — que Michel Gérault, un auteur d'albums destinés aux tout-petits que j'ai eu deux ou trois fois l'occasion de rencontrer dans des salons. Or, une certaine familiarité est de mise, chez les écrivains pour la jeunesse. La tradition veut qu'on se tutoie et qu'on s'embrasse, même si on se connaît à peine. M'adressant à lui, je m'écrie donc :
— Ben... qu'est-ce que tu fous là ?
— Tu le vois, me répond-il sur le même ton badin. Je suis, moi aussi, venu admirer la grande Camille.
— Eh bien, si je m'attendais à te rencontrer ici !
Et, ni une ni deux, je lui saute au cou... sous le regard ébahi de Julia.
— Ben dis donc, tu vas vite en besogne ! me glisse-t-elle, dès que mon interlocuteur s'éloigne. Il y a à peine trois mois que tu habites la région, et tu embrasses déjà le maire de Gaillac !
Je reçois sa réflexion comme un coup de poing dans le ventre.
— Le... le maire de Gaillac ?! Ce n'est pas l'écrivain Michel Gérault ?
— Non, il est avocat.
La honte !
Durant toute la séance de dias, je rumine mon humiliation, et dès qu'elle se termine, je me rue sur le maire pour m'excuser, arguant qu'il possède un sosie dans ma profession.
— Ne soyez pas gênée, me répond-il en riant, je rencontre tellement de gens, moi aussi, que j'ai cru que nous nous connaissions...
Quelques mois plus tard a lieu le salon du livre de Gaillac où, coïncidence troublante, Michel Gérault est invité. Je lui raconte l'histoire, puis j'avise le maire et je le lui présente :
— Voici la personne avec laquelle je vous ai confondu.
Tous deux me lancent un drôle de regard. Confrontation faite, ils ne se ressemblent pas du tout...
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Commentaires
J'aurais bien aimé savoir où elle habitait.
ça me rappelle une scène de Gentille
http://cinema.leparisien.fr/bande-annonce/gentille/57667/15GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:506DelphineVendredi 29 Août 2014 à 13:507GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:508GuduleVendredi 29 Août 2014 à 13:50
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Heureusement que tu es meilleur écrivain que physionomiste !
Si ça peut te rassurer, je peins des portraits, mais je serais incapable de reconnaître la vache qui rit sur le château d'eau de Lons !