• grands moments de solitude 138 (tome 2)

     

                             Mini-jupe

     

            Mon frère m’avait prévenue, quand je suis partie au Liban :

             — Tu vas dans un pays où les hommes sont en manque, alors évite toute provocation vestimentaire. C‘est une question de respect. Inutile de titiller des frustrations sociales qui ne demandent qu’à s’exprimer et te mettraient dans l’embarras. Les décolletés profonds, les mini-jupes, les jean’s moulants, les chemisiers transparents ; oublie !

             Bien que la mode soit aux tenues affriolantes, je me conformai à ces conseils que j’estimais sages, et n’emportai dans mes valises que des robes couvrant les genoux.

             Sauf une jupette à pois, cadeau d’anniversaire de ma meilleure amie. Une mini ras-le-bonbon comme on disait alors, qui mettait en valeur mes cuisses maigrelettes et mon p’tit popotin d’à peine dix-huit ans.

             « Tu la porteras sur la plage », me disais-je, en guise d’alibi — ce que je ne fis jamais. De sorte qu’elle resta pliée dans mon armoire, d’où Joumana, la cousine d’Alex, finit un jour par l’extirper.

             — Oh, elle est adorable ! Tu me la prêtes ? s’écria-t-elle.

             Je fis mieux, je la lui offris, en précisant :

             ­ — Je ne la mets plus. Pour une mère de famille, ce n’est vraiment pas pratique : sitôt que je me baisse, on voit ma culotte.

             ­— On peut voir la mienne, ça ne me dérange pas, répondit Joumana.

             Je ne lui rappelai pas les mises-en-garde de mon frère : elle était née ici et n’avait nul besoin de mes conseils. Une étrangère n’allait pas lui apprendre à vivre chez elle, quand même !

             L’incident eut lieu dans l’après-midi. Nous attendions quelqu’un à l’aéroport de Beyrouth. Penchée sur la rambarde de l’aire d’embarquement, Joumana exhibait gentiment son derrière quand un voyageur se rua sur elle. La braguette collée au slip de dentelle, — et en dépit des hurlements de sa victime — il se livra sur elle à des voies de fait que nous eûmes toutes les peines du monde à interrompre. Quelques bras musclés l’ayant arraché prématurément à l’extase, le malotru se retrouva au poste, tandis que Joumana me lançait, furibonde :

             — C’est ta faute tout ça, avec tes fringues de merde ! Vous êtes bien toutes des charmoutas*, vous les Françaises !

     

    * charmouta = putain

            

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  • Commentaires

    1
    Pata
    Jeudi 29 Octobre 2015 à 00:03

    Les petits poids de la luxure sont toujours portés par les femmes : même si ce sont les hommes qui s'y frottent, ce sont elles qui s'y piquent :(

    2
    Jeudi 29 Octobre 2015 à 03:16

    Oui, hein, Pata, certains hommes sont vraiment des bourrins qui bavent sur les pouliches.

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