• grands moments de solitude 105 (tome 2)

     

                                                Cry, baby

     

             On fait parfois d’étranges rencontres, dans les salons. En 1998, à Montreuil, je dédicaçais au stand Hachette, quand une jeune femme s’approche de moi et, sans préambule, fond en larmes. Devant mon ahurissement (et celui de mes collègues), elle déclare, d’une voix hoquetante :

             — Excusez-moi, c’est l’émotion. La Bibliothécaire m’a bouleversée au-delà de tout. C’est le livre que j’aurais rêvé d’écrire. Vous rencontrer, c’est comme rencontrer une autre moi-même idéale…

             Bien embarrassée, je l’invite à prendre un café à la buvette, histoire qu’elle se remette, mais rien à faire : elle pleure, pleure, pleure sans discontinuer. Et pendant ce temps-là, devant mon stand, la file s’allonge… Je finis quand même par m’esquiver, nantie de ces précieux renseignements : elle s’appelle Bérénice, est documentaliste dans un collège de la région parisienne, et c’est la première fois qu’elle se comporte ainsi.

             La première mais pas la dernière, car l’année suivante, rebelote. En pleine signature, elle se pointe devant moi et éclate en sanglots. Autour de nous, tout le monde ricane en se chuchotant des trucs à l’oreille. Je n’ai d’autre choix que d’emmener Bérénice à la buvette, où elle me réexplique les raisons de son émoi.

             Elle me les réexpliquera encore en 2000, où la même scène se reproduit à l’identique, puis en 2001, de sorte qu’en 2002, je prends les devants. Au risque de passer pour une frimeuse, j’explique aux quatre auteurs présents ce qui risque de se produire, et ça ne loupe pas : Bérénice déboule comme les autres années. Mais cette fois, elle a les yeux secs, et dégage même une certaine agressivité.

             —  Je suis terriblement déçue, me lance-t-elle de but en blanc. J’ai lu « L’amour en chaussettes », c’est très mauvais. Vulgaire, démago, sans inspiration. Vous avez sali votre image. Je n’ouvrirai plus jamais un seul de vos livres.

             Ça a bien rigolé, ce jour-là, au stand Hachette !

     

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  • Commentaires

    1
    Yunette
    Mardi 8 Septembre 2015 à 09:37
    C'est pas ce qu'on appelle une femme fontaine ? ^^
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    2
    Mardi 8 Septembre 2015 à 10:20

    Visiblement, cette femme n'a pas compris qui était Gudule. Elle aurait dû s'en tenir à "Oui-Oui et la gelée géante" (comme sa cervelle).

    3
    Lundi 21 Septembre 2015 à 11:50

    Hé ben... Voilà une pleureuse qui ne fait pas dans le demi mesure en manière de jugements  '_'

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