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CONTES À VOMIR DEBOUT 23
Vive maman !
Sans être vraiment belle, Marylou avait ce que, dans les années soixante, on appelait « du chien ». En d'autres termes, elle aurait fait bander un centenaire autiste, tétraplégique et dépressif. Pour une chanteuse, c'était un sacré atout. La foule qui se pressait à chacun de ses concerts lui faisait un triomphe, et ses ventes de disques montaient à l'unisson. D’autant qu’elle retirait sa culotte sur scène, chose somme toute assez banale mais toujours appréciée du public.
Cependant, au grand dam des journaux à scandale, ce sex-appeal ravageur s'avérait sans objet, dans le privé. On ne connaissait à Marylou aucune liaison masculine, ce qui lui valut le surnom de « Vierge Noire », tant en raison de ses mœurs que de son look gothique : chevelure d'ébène, œil charbonneux, lèvres en deuil, fringues de jais. Et peau d'une blancheur frisant le translucide.
Dès lors, quelle ne fut pas la surprise du bon peuple lorsque se répandit l'ahurissante nouvelle : la Vierge Noire avait le ballon — un polichinelle dans le tiroir, un coquin dans la boîte à malice, un diablotin dans le confessionnal... Bref, en un mot comme en cent, elle trimbalait un petit ventre rond comme n'importe quelle femelle normalement honorée.
Démenti immédiat de la dame : « N'ayant point fréquenté, je ne puis avoir conçu. Il s'agit d'autre chose : une tumeur, un gaz, une quelconque hypertrophie abdominale dont la médecine va me débarrasser ». Mais le bon peuple n'en crut mot. L'auteur du volume suspect ne pouvait être qu'un fripon bien membré, ayant valeureusement œuvré pour la propagation de l'espèce. La Vierge Noire était victime du plus banal virus qui soit : celui de la reproduction.
Elle accoucha d'un gentil garnement — doté, cependant, d'une curieuse particularité physique : il semblait éclairé de l'intérieur, et brillait comme les vers luisants qui peuplent nos campagnes à la belle saison. Sa mère le nomma Néon, ce qui lui allait fort bien.
Néanmoins, le mystère de sa conception restait entier.
Au terme d’une enquête menée de main de maître, un détective privé, mandé par la victime, finit pourtant par découvrir le coupable. Il s'agissait du régisseur de la vedette. Oyez, braves gens, comment procéda l’infâme scélérat.
Neuf mois auparavant, quand Marylou, dans un grand élan de chaleur humaine, avait offert sur scène le meilleur d'elle-même en retirant son dernier voile, là-haut, à la régie, le préposé concoctait l'éclairage adéquat. Mais un homme est un homme, et tandis qu'il braquait ses projecteurs sur elle, il se branlait de l’autre main. Or, la lumière, comme chacun sait, est conductrice de vie. À l’instant fatal, le rayon lumineux véhicula donc les spermatozoïdes jusqu'à la belle déculottée qui, de la sorte, se retrouva fécondée sous l’œil des spectateurs.
Suite à cette effroyable découverte, Marylou prit une décision sans appel. Elle effectuerait désormais son effeuillage dans le noir, coupant court, de la sorte, à toute récidive de viol par watts interposés.
Ainsi fut fait. À dater de ce jour, au moment suprême, sous les hurlements enthousiastes de la foule, tout s'éteignait. Et c'est dans l'obscurité la plus totale que la chanteuse se dévêtait — ce qui décupla encore son succès. De national, il devint européen, puis mondial, et ne tardera pas à être planétaire. Ma mère le disait toujours : dans le domaine du sexe, rien ne vaut la suggestion. C'était une femme de grand bon sens, maman !
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Commentaires
1Benoît BarvinVendredi 1er Février 2013 à 08:47Répondre5guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:386NadègeVendredi 29 Août 2014 à 13:387guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:388NadègeVendredi 29 Août 2014 à 13:389guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:3810guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:3811guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:38
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