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CONTES À VOMIR DEBOUT 2
Vaccination obligatoire
L'affiche est apparue un beau matin sur les murs de Paris : SAUVEZ LA VIE DE VOS ENFANTS, FAITES-LES VACCINER CONTRE LE RHUME ! Et en plus petit : Tout mineur trouvé sur la voie publique non muni de son certificat de vaccination anti-rhume sera abattu par les forces de l’ordre.
Ça m'a fichu un choc, d'autant que les médias ne cessaient de proclamer que ce vaccin, totalement inefficace et très cher, n’était pas remboursé par la Sécurité sociale. Mais le péril, en l'occurence, venant non du virus mais des pouvoirs publics, la population n'eut d'autre choix que de se soumettre.
Ce fut la ruée chez les toubibs, dans les hôpitaux, les cliniques, les dispensaires. Les laboratoires, en rupture de stock, œuvrèrent jour et nuit afin d’alimenter les seringues, et des camions-citernes de produits sanitaires furent acheminés dans toute la France. En quelques mois, l'industrie bio-chimique, le corps médical et les transports routiers multiplièrent leurs bénéfices par dix. Et les caisses de l'État s'emplirent par ricochet.
Hélas, le vaccin n’était pas anodin. Entre autres effets secondaires, il faisait enfler jusqu'à l'explosion. Ce ne furent, tout d'abord, que quelques cas isolés dont on ne tint pas compte : toute inoculation comporte un quota d'allergies, même minime. Mais bientôt les symptômes se généralisèrent. Devant l‘ampleur du désastre, des associations de consommateurs montèrent au créneau. Une enquête s’ensuivit, puis un procès retentissant où furent mouillés nombre de hauts fonctionnaires — dont le premier ministre qui dut, en catastrophe, donner sa démission. Afin d’apaiser la population, le gouvernement leva d’urgence un nouvel impôt pour financer la recherche d'un antidote.
Il était temps : les victimes, à présent, se comptaient par millions. Chaque jour, des centaines d’entre elles éclataient dans les rues, les transports en commun, les squares, les magasins, souillant l’environnement de débris organiques. Les entreprises de pompes funèbres, débordées, créèrent collectivement une société de nettoyage aux méthodes révolutionnaires, qui vendit ses services à prix d’or. L’industrie de la mort, qui n’avait jamais été aussi florissante, fut taxée en conséquence, et l’Etat, renfloué, put mettre sur pied un système d’indemnisation qui lui rendit, un temps, sa popularité.
Jusqu’à ce que...
La Recherche, grassement subventionnée, ayant fait un bond en avant, les murs de Paris se couvrirent bientôt d’affiches libellées en ces termes : SAUVEZ LA VIE DE VOS ENFANTS, FAITES-LES VACCINER CONTRE LE VACCIN ! Et, en plus petit : Tout mineur trouvé sur la voie publique non muni de son certificat de vaccination anti-vaccin sera abattu par les forces de l’ordre.
Lors, la population, hors d’elle, se révolta et, au terme de sanglants combats de rues, renversa le gouvernement. Ce fut le début d'une formidable ère de prospérité pour les armuriers.
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Commentaires
1LunatikLundi 24 Décembre 2012 à 09:46Répondre
Je me suis bien amusé.6guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:39
@ Benoît : Allons allons, ces désespoirs valent bien ceux des p'tites histoires (et même des grandes) de Tu Quoque ! Mais bon Noël quand même...7NadegeVendredi 29 Août 2014 à 13:398OdomarVendredi 29 Août 2014 à 13:39
Et "une formidable ère de prospérité pour les armuriers" c'est bien ce que vivent les USA aujourd'hui. Comme quoi...9guduleVendredi 29 Août 2014 à 13:39
@ Odomar et Castor : comme quoi nos sociétés n'évoluent pas beaucoup. Ce conte doit dater de 1986... Sire Nic était encore un adolescent boutonneux.
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