•  

                                  PUNCHING GOSSE

                                                    

             — Ils commencent sérieusement à me gonfler, ces cons ! râle mémé Georgette.

             — Qui ça, mémé ?

             — Les journalistes.

             — Qu’est-ce qu’ils t’ont encore fait ?

             — Ils montent en épingle une histoire sordide, qui n’aurait jamais dû sortir du cadre privé.

             — Laquelle ?

             — Celle de la petite Élise.

             — La gamine enlevée par sa mère ?

             — « Enlevée », tout de suite les grands mots ! Comme s’il s’agissait d’une pédophile sérial-killeuse !

             — Le père a quand même été tabassé !

             — Ouais, et la mère arrêtée, tout ça devant la môme. Ça donne envie de gerber, je te l’accorde, mais ne justifie pas le battage médiatique qu’on en fait depuis des semaines !

             — C’est de l’info !

             — Info mon cul ! Moi, j’appelle ça du ragot de bas étages. Que des parents s’arrachent leur môme comme si c’était le pompon du manège, je trouve déjà ça pitoyable. Mais que la télé, la radio, les journaux et le net s’en gargarisent jusqu’à l’overdose, c’est encore pire, à mon avis !

             — T’es marrante, toi ! Si on ne parle pas de ce genre de truc, de quoi veux-tu qu’on parle ?

             — Les sujets ne manquent pas : les injustices sociales, les lois liberticides, les expulsions, les sans-abris, les bavures policières, la Palestine, la Thaïlande, la faim dans le monde... Quant aux abrutis qui utilisent leur fille de trois ans comme punching ball, j’ai une suggestion pour les mettre d’accord une fois pour toutes : on coupe la gosse en deux et on leur en donne la moitié à chacun. Comme le roi Salomon !

             — Mais... t’es complètement folle !

             — Pourquoi ? La petite souffrirait moins, personne ne serait lésé, et en plus, ça nous ferait des vacances.

             Au secours, v’là mémé qui pète encore les plombs ! Faudrait lui interdire le journal télévisé, c’est mauvais pour son Alzheimer !

     


    votre commentaire
  •  

                                      PEOPLE CRACRA

     

             Mémé Georgette s’étrangle de rire, dans son fauteuil.

             — Qu’est-ce que t’as, mémé ?

             — Je lis « Le Parisien ».

             — Ah ? Et alors ?

             — On y apprend des choses passionnantes. Savais-tu que Sarkozy rééduquait son périnée ?

             — Pardon ?

             — C’est écrit noir sur blanc : l’Élysée a fait appel à une spécialiste de l’entrejambe, Julie Imperiali, pour s’occuper de celui  du couple présidentiel. « Si cet ensemble de muscles mal connu, situé entre le pubis et le coccyx, est  trop relâché, cela engendre des fuites urinaires, des problèmes d’éjaculation précoce, voire une descente d’organes » nous apprend-elle dans une interview.

             — Attends... Tu es en train de me dire que le président de la République pisse au lit ?

             — Nous n’en sommes peut-être pas encore là, mais il craint sans doute que ça lui arrive !

             — Y a quand même un truc qui m’échappe... Toi, par exemple, tu aurais ce genre de problème, t’en parlerais dans les journaux ?

             — Certainement pas, pour qui me prends-tu ? Même à toi, je ne dirais rien !

             — Alors, comment se fait-il que Sarkozy, lui...

             — La transparence, mon enfant ! Notre cher président ne cache rien à son peuple : ni ses augmentations de salaire, ni ses affaires de cœur, ni son répertoire d’insultes... Pourquoi voudrais-tu qu’il s’arrête en si bon chemin ?

             — N’empêche, moi, à sa place, j’aurais honte !

             — C’est pour ça que tu ne seras jamais cheffe d’État. En donnant le bon exemple à ses concitoyens, Sarko crée une émulation. Dans les mois à venir, je te parie que les cabinets ( !) de rééducation pelvienne vont être pris d’assaut. Ça relancera l’économie !

             — Mais ça va faire baisser les ventes de couches-culottes !

             — Tant mieux : c’est anti-écologique au possible, ces trucs-là ! Les Verts vont être content. Et tout ça grâce à qui ? À la presse cracra. Nous vivons vraiment une époque formidable ! 


    votre commentaire
  •                                 

                                 TRADITION BOLLYWOOD

     

             « Foutre ! s’étrangle mémé Georgette.

             — Qu’est-ce que t’as, mémé ?

             —  Douze femmes indiennes sont brûlées toutes les heures, affirme la revue médicale britannique The Lancet. Six fois plus que les estimations les plus alarmistes... »

             J’ouvre des yeux ronds.

             « Comment ça se fait ?

             —Toujours selon cette étude, il s’agit essentiellement de meurtres maquillés en accidents domestiques. 

             — Mais... pourquoi ?

             — En Inde, quand une femme se marie, sa famille paie à celle du fiancé une dot de deux lakhs (l’équivalent de 3000 €, dans un pays où le salaire mensuel moyen est de 60 €) et équipe entièrement la maison du jeune couple. Bien que cette pratique soit interdite depuis 1961, elle est, aujourd'hui, plus virulente que jamais. « Élever une fille, c’est comme arroser le jardin d’un voisin » dit un proverbe local...

             — Quel rapport avec les morts par le feu ?

             — Ben... les familles préfèrent n’avoir que des fils. Résultat : suppression des petites filles à la naissance (163 millions en 2005, selon le Fonds des Nations) ou des adolescentes en âge de convoler.

             — Quelle horreur !

             — Et ce n’est pas tout. Il ne faut pas croire qu’une fois casées, les malheureuses soient tirées d’affaire ! Certes, leurs parents se sont ruinés pour leur assurer une position sociale, mais c’est compter sans l’avidité des belles-familles : la lune de miel terminée, des milliers d’épouses disparaissent, afin que leurs veufs puissent se remarier et toucher une seconde dot...

             — Mais... que fait la police ?

             — Elle ferme les yeux. Ces crimes, appelés dowry death, sont ancrés dans la tradition, tu comprends ?

             — Et alors ?

             — Dans quelque pays que ce soit, la tradition sert d’alibi aux pires atrocités. Alors, fillette, un bon conseil : quand on prononce le mot « tradition » devant toi, fais comme moi, sors ton flingue ! »

     


    votre commentaire
  •  

                              Mémé Georgette pète les plombs

     

             « Finalement, je ne suis pas d’accord, déclare mémé Georgette, le regard étrangement fixe.

             — Avec quoi t’es pas d’accord, mémé ?

             — La dépénalisation du délit d’outrage. Dans quelque régime politique que ce soit, quand la politesse fout le camp, tout fout le camp. 

             — Ah bon ? On n’a plus le droit de dire merde aux flics, alors ?

             — Non. Ni de hurler « Casse-toi pôv’con » sur le passage du président. Ni d’écrire que son fils ira-loin-ce-petit. Ni d’envoyer des mails à la garde des sceaux sous le label « Rachida-la-grosse-pute » — d’autant qu’à travers elle, c’est toutes les femmes qu’on humilie...

             — Tu te sens concernée, toi ?

             — Et comment ! Insulter une personne — que dis-je ? une icône ! — qui incarne avec tant de brio ce qu’il y a de meilleur chez ses contemporaines : la beauté, l’élégance, la réussite sociale, l’intelligence, la maternité triomphante, etc, c’est fouler au pied l’essence même de la féminité... Le monstre qui a commis cette infamie mérite perpète !

             — Tu exagères !

             — Du tout ! Ce serait moi, je rétablirais les galères, tiens ! Ou alors, les culs de basse fosse à la Louis XI, où l’infâme internaute croupirait dans ses déjections, sans air, sans lumière et sans ordinateur !

             — M’enfin, mémé...

             — Il y a des valeurs avec lesquelles on ne transige pas, ma petite ! Le respect de l’Autorité en fait partie. N’oublie jamais que c’est l’un des fondements de la République !

             —  On peut continuer à se moquer du pape, au moins ?

             — Bien sûr que non ! Ni du pape (même promoteur de sida), ni des évêques (même nazis), ni des moines (même paillards), ni des curés (même pédophiles) ! Ce sont les représentants de Dieu sur terre, nous devons les vénérer à genoux ! »

             OK, j’ai compris, c’est le 1er avril. N’empêche, durant quelques instants, j’ai flippé grave ! J’ai cru qu’elle yoyotait, mémé


    votre commentaire
  •  

                                  Le temps des martyrs.

     

             «  Putain ! éructe mémé Georgette. Faut alerter le pape ! 

             — Le pape ? Pourquoi faire ?

             — En  février 2008, dans la gare Saint-Charles, à Marseille, un prof de philo de 47 ans a eu une vision céleste. En plein contrôle policier, il est soudain tombé à genoux, les bras en croix, en criant par deux fois, d’une voix forte : « Vierge Marie, je te vois ! ».

             — Non ?! Et comment ont réagi les gens ?

             — Ils ont éclaté de rire, cette bande de mécréants. Résultat : les flics ont cru que le type se foutait de la religion, et ils l’ont embarqué.

             — Euh... T’es sûr qu’il ne criait pas plutôt « Sarkozy, je te vois »?

             — Tu rigoles ? Dans ce cas, on ne l’aurait pas arrêté. Bon, il aurait crié « je t’encule », j’aurais compris — quoique ! —, mais « je te vois », franchement, là, l’infraction m’échappe... En plus, personne ne tombe à genoux quand il voit Sarkozy (sauf peut-être son épouse, mais, bien que le couple présidentiel ne soit pas d’une pudeur forcenée en ce qui concerne sa vie privée, je ne m’aventurerais pas sur ce terrain miné) !

             — Tu te fous de moi, mémé ?

             — Pas du tout, mon enfant, j’essaie juste de comprendre. Parce que le visionnaire est quand même traduit en justice. Une amende de 100 euros est requise à son encontre. Or, seul le fanatisme religieux peut justifier une telle aberration...

             — Tu veux dire que le nom de Sarkozy est sacré ?

             — Je le suppose, puisque le simple fait de le prononcer est passible des tribunaux.

             — Ça fout les jetons !

             — Et pas qu’un peu ! Nous saurons le 3 juillet, quand la sentence tombera, si une ère d’Inquition civile vient de s’ouvrir, en France. Voici peut-être revenu le temps des martyrs... »

     


    votre commentaire