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                                                        DISTRIBUTION DES PRIX

     

     

             La date de remise des prix, pour les lauréats du Coin des petits, a été fixée au 21 juillet. Ainsi en a décidé Alexandre Hélou.

              — J'ai choisi un samedi pour que les pères puissent y assister, a-t-il précisé, en l'annonçant à Rose.  

    —  Qu'est-ce qu'on leur donne, aux gosses, comme récompense ? s'est enquise celle-ci.

    La réponse est tombée, tel un couperet :

      Ça, ma petite, c'est votre affaire, pas la mienne.

    L'on imagine sans peine l'embarras de Rose.

                 — Mais… mais…mais… où voulez-vous que j'aille chercher des lots, moi ? Je ne peux quand même pas les payer de ma poche ! 

    Par chance, Jasmina Tabet, la responsable de la rubrique beauté, a plus d'un tour dans son vanity case. 

    — À votre place, je m'adresserais aux boutiques du quartier, lui suggère-t-elle. Je suis sûre qu'un bon nombre d'entre elles vous donneraient des marchandises, en échange d'une pub dans le journal.

    Excellente idée ! Dès le lendemain matin, ayant confié sa progéniture à la décidément indispensable Mona Aoun, Rose part en chasse.

    Jasmina Tabet ne s'est pas trompée : à de rares exceptions près, les commerçants de la rue Hamra accueillent sa requête avec bienveillance et s'empressent de lui refourguer leurs fonds de tiroir. Après une harassante journée de porte-à-porte, Rose se retrouve donc en possession d'une bonne soixantaine d'objets hétéroclites, qui vont du manteau taille 10 ans (modèle de l'année précédente) au train électrique (boîte défraîchie) en passant par la coupe-brushing gratuite chez Coiff'hair, le bon d'achat au Nader-supermaket et le flacon de parfum "spécial fête des mères" de chez La Sultane. De quoi combler TOUS les petits participants, et même bien davantage.

    Il n'y aura donc, à la grande joie de Rose, que des gagnants.

    En bénissant les généreux donateurs, elle se met à l'ouvrage. Il s'agit à présent d'attribuer judicieusement les prix. Le brushing conviendra mieux à une adolescente qu'à un bambin de quatre ans, le train électrique sera plus apprécié par un garçon que par une fille, etc. Avec l'aide de Jasmina, décidément fort serviable, et de Moktar, l’homme à tout faire, elle emballe, étiquette et dispose les cadeaux dans d'immenses paniers prévus à cet effet. Puis elle entreprend de suspendre guirlandes et lampions dans l'austère salle de réunion qui lui a été dévolue pour l’occasion.

    Lorsqu'Amir, sa répétition terminée, vient la récupérer sur le coup des onze heures, elle est exténuée. Mais tout est prêt pour la cérémonie.

    De son côté, Mona Aoun a assuré : les enfants sont couchés, la maison rangée, et un petit repas froid trône sur la table de la cuisine.

    — Tu es merveilleuse, s'écrie Rose en lui sautant au cou. Je ne te remercierai jamais assez !

     —Va savoir, répond Mona Aoun, un étrange sourire aux lèvres.

     

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                                                         UN CHAT MASO

     

    Tu ne connais pas la dernière de Grégoire ?

    Non… Qu'a-t-il encore inventé, ce garnement ?

    — Jette un coup d'œil sous le figuier… Doucement, hein ! Ne le réveille pas !

    Amir se glisse dans le jardin sur la pointe des pieds. Et découvre son fils endormi, la tête posée sur le chat. L'un ronflote, l'autre ronronne, dans la plus parfaite harmonie.

    — C'est son nouveau jeu, chuchote Rose. Il trimballe Bébête partout avec lui, le pose n'importe où et s'en sert comme oreiller.

    Pauvre bête… Tu le laisses faire ?

    — Ben… oui. Au début, je râlais, mais le chat ne paraît pas en souffrir, au contraire. Dès que je le sépare de Grégoire, il miaule pour le rejoindre. On dirait qu'il en redemande.

    Nous voilà bien, glousse Amir. On a adopté un chaton maso.

     


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                                 L’INDÉSIRABLE

     

    Rose ! Rooose !

    Interrompue en plein travail, Rose se penche à la fenêtre.

    Chut, Mona, pas si fort. Olivier dort.

             — Oh, pardon ! Tu m'offres un thé ? J'ai apporté des fitir bi agua.*

    Rose se mord les lèvres.

    C'est que… je suis déjà en retard pour ma rubrique, et…

    — Juste une petite pose. Je ne te dérangerai pas longtemps, je te le promets. 

    Soupir vaguement irrité.

    Bon, d'accord, je descends. Entre, la porte est ouverte.

    Mona est si gentille, n'est-ce pas ? Un peu envahissante, certes, mais toujours prête à rendre service. Rose le disait encore hier, à son mari :

    — Qu'est-ce que je ferais sans elle ?  ­

    — C'est surtout elle qui a besoin de toi,  a-t-il répondu.

    Peut-être n'est-ce pas tout à fait faux. 

     

    Une heure plus tard, elle est toujours là. Et Rose ronge son frein sans rien oser dire.

     

     

                                                                    *

     

     

    — Tu viens te coucher, Rose ?

    — Je termine et j'arrive. Tu pourras porter mes deux pages à Orient-Magazine, demain, en passant ?

    D'ac'… Comment ça se fait que tu bosses aussi tard ?

    — Mona s'est incrustée tout l'après-midi… Elle avait apporté des gâteaux merveilleux, remarque ! Je me suis régalée… Tiens, au fait, elle m'a appris un truc affreux : elle a été excisée*, quand elle était petite. Tu savais que les mutilations sexuelles se pratiquaient en Égypte, toi ? Moi, je croyais que c'était seulement dans certaines tribus d'Afrique…

    — Non, elles sont encore en vigueur dans pas mal de franges dures de l'Islam.

    — Quelle coutume ignoble ! J'en suis toute retournée… Du coup, les hommes ne l'ont jamais intéressée. Forcément, elle n'éprouve pas de plaisir.

    Elle s'est mariée, pourtant.

    — Avec un vieux qui était déjà malade quand elle l'a épousé. Elle lui a servi d'infirmière, en fait. C'est triste, hein, une vie gâchée.

    Bah, elle n'a pas l'air si malheureuse… Il était très riche ?

    Moue dubitative de Rose.

    — Je n'ai pas demandé de détails, mais riche ou pas, elle lui a sacrifié sa jeunesse et ce genre de chose n'a pas de prix.

    Si : un bel héritage.

    Oh, tu es cynique !

    — Réaliste, plutôt. Elle a assuré son avenir, ta Mona, et là, elle est peinarde pour un bout de temps. Ça vaut bien un petit sacrifice, non ?

    Rose hoche la tête, pas du tout convaincue.

    — Ben moi, j'aurais préféré tirer le diable par la queue jusqu'à la fin de mes jours. 

    Évidemment, : toi, tu ne penses qu'à l'amour,  sourit Amir.

    Et elle, brusquement câline :

    Tu t'en plains ?

     

     

    *Fitir bi agua : petits gâteaux secs fourrés à la pâte de figue

     

     


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    FIN DES COMBATS

     

    Après six jours d'affrontements, les combats s'arrêtent aussi subitement qu'ils avaient commencé. Et le Liban retrouve sa sérénité. Provisoirement, s'entend. Il ignore encore que cette guerre-éclair n'est que le prélude aux quinze années noires qui vont bientôt le déchirer, dressant les unes contre les autres ses différentes communautés, et le laissant exsangue et dévasté.

    Mais n'anticipons pas, l'heure est à l'allégresse. Dans Zouk rasséréné, les mêmes villageoises qui, une semaine plus tôt, se lamentaient à grands cris, rendent grâce au Très-Haut. Les rayons de l'épicerie se remplissent à nouveau, les échoppes rouvrent leurs portes sur le chant des métiers à tisser, les enfants recommencent à jouer dans les rues. Seuls ceux qui avaient engrangé de trop grandes quantités de nourriture font la grimace, car tout se périme vite, en Orient, l'été. Charançons et punaises prolifèrent dans le riz, les pâtes, les lentilles, de sorte que les poubelles débordent bientôt de denrées alimentaires à peine entamées et déjà impropres à la consommation.

    — Si ce n'est pas malheureux, un gâchis pareil ! vitupère Mona Aoun, en vidant ses placards. Rose, je t'en prie, embarque-moi cette bouffe tant qu'elle est encore bonne, ça m'évitera de la jeter.

    Et Rose s'en retourne chez elle les bras chargés de provisions, en se disant que, finalement, Tout est bien qui finit bien.

     

     


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  • Ce soir, en direct entre 20 et 21 heures sur RCN 90.7 et en streaming sur http://www.rcn-radio.org/wp-content/uploads/wp-BD-jplayer/2014_02_19_inter_cours.mp3, la vingt-quatrième édition d'Intercours sur RCN sera cravachée par Madeleine Bertolotti, avec la grande équipe d'Intercours : Flamme Justine, Arnaud Rivet, Guillaume Masson, Quentin Burg, Didier Rousset, Matthieu Grandpierre et Daniel Conrad. Deux sujets : "Nancy : la Maison de la Finance et les banques recrutent 200 étudiants" avec comme invité Nicolas Lambert, directeur de la Maison de la Finance, et la présence d'un directeur d'agence bancaire. Puis "L'affaire Copé/Livre Tous à poil", avec la grandissime Gudule, quarante ans de carrière littéraire et plus de 400 livres pour enfants. Mais aussi le JiTétudiant, l'Agenda, Les Yeux dans les Yeux, le Coup de cœur, le Coup de gueule... Bref, encore une grande émission en perspective !


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