• Episode 84

              Résumé des chapitres précédents :  Le docteur Branquenstein n’est pas un mauvais bougre, et son whisky est bon.

     

             — Excellente idée, dit Zoé, à qui l’alcool donnait toutes les audaces. Causons... Et commencez par m’expliquer pourquoi le bras de Dora Drelin se trouve accroché à l’épaule de Chouchou.

             La question, trop directe, prit Branquenstein de court.

             — Ah, parce que... vous savez ? s’étrangla-t-il.

             Une quinte de toux s’ensuivit, car sous l’effet de la surprise, il avait avalé sa gorgée de travers.

             — Je vous ai vu, tout à l’heure, précisa Zoé en lui tapant dans le dos. Alors, inutile de nier, hein !

             — Je n’en ai pas l’intention, mais permettez-moi de vous faire remarquer que vous êtes une foutue indiscrète. Vous avez violé mon intimité.

             — C’était pour la bonne cause... Alors ? J’attends vos explications !

             Le docteur Branquestein s’éclaircit la voix, comme avant une conférence.

             — Sachez tout d’abord, commença-t-il, que je suis un grand mélomane. L’opéra, en particulier...

             Zoé hocha la tête :

             — Mouais... J’avais cru comprendre...

             — Quand j’appris par la presse la disparition de Dora Drelin, ce fut pour moi un choc terrible. Elle était mon idole, comprenez-vous ? Ma cantatrice chauve à moi...

             — Chauve ? Pourquoi chauve ?

             — Elle portait une perruque, vous ne le saviez pas ? Vous ne lisez donc pas les journaux peoples ?

             A sa grande honte, Zoé avoua que non.

             — Bref, reprit Branquenstein avec un haussement d’épaules, j’éprouvais pour elle une véritable adoration...

             Il ponctua ces mots d’une nouvelle gorgée. Ses propres paroles le transfiguraient.

             — Aussi, quand la police retrouva quelques-uns de ses restes, décidai-je de tenter le tout pour le tout : l’inclure dans le plus ambitieux de mes projets, la création d’un homme-patchworck.

             — Chouchou ?

             — Exactement. Chouchou, mon chef d’œuvre, le couronnement de ma carrière. L’aboutissement de tous mes efforts. La consolation de mes vieux jours...

             — Composé comme il se doit...

             — ... de bouts de cadavres, oui.

                                                                                                                                        (A suivre)

     


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  • L’instant d’émotion

               Nous sommes en voiture avec ma petite-fille Nina (quinze ans) quand je dis à Sylvain : 

             — Il faudrait peut-être qu’on se marie, qu’en penses-tu ?  Ce serait plus simple pour les impôts.

             — J’attends que tu me fasses ta déclaration, répond-il en riant.

              Alors moi, jouant le jeu :

             — Cher Sylvain, j’ai l’honneur de te demander ta main.

              On se marre, puis on passe à autre chose lorsque soudain, un léger reniflement attire mon attention. Je me retourne ; Nina se tamponne le nez avec un Kleenex.

               — Ben quoi ? répond-elle à ma question muette. Je viens d’assister à la demande en mariage de ma grand-mère, et tu t’étonnes de me voir pleurer ?

                 Ce n’est pas une blague, elle a vraiment la larme à l’œil. 

     

     


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  • Episode 83

              Résumé des chapitres précédents : Ça va mal pour Zoé. Branquenstein la tient en joue, au bout de son flingue. Va-t-elle subir le même sort que feue Dora Drelin ?

     

             — Allez-y, assassin ! frima Zoé d’un air mauvais. Tirez donc ! Epinglez-moi à votre tableau de chasse !

             Derrière ses grosses lunettes de myope, le docteur Branquenstein ouvrit des yeux ronds.

             — Mais... pourquoi dites-vous ça ? J’ai jamais tué personne, moi !

             — Ben voyons... Et Dora Drelin, alors ? Ce n’est pas vous qui l’avez découpée en morceaux, peut-être ?

             — Jamais de la vie ! Vous vous méprenez tragiquement, mademoiselle. Je suis résurrectologue, moi, pas l’inverse.

             — C’est-à-dire ?

             — Que je tente de faire revivre ceux que les autres ont tués.

             Il avait l’air sincère. Voyant s’effondrer toute sa belle théorie, Zoé fondit en larmes.

             — Ce sont vos nerfs qui lâchent, diagnostiqua le toubib, en déposant son revolver sur le bureau. Asseyez-vous, je vais vous préparer un petit remontant.

             D’une armoire vitrée, il sortit une fiole et deux verres qu’il emplit d’un liquide ambré.

             — Qu’est-ce que c’est ? se méfia Zoé comme il lui tendait le sien.

             — Rien qu’un honnête whisky, rassurez-vous. Je n’ai pas pour habitude d’empoisonner mes visiteuses.

             Avec un reste de méfiance, notre héroïne flaira la boisson, y trempa les lèvres.... puis se l’envoya d’une traite.

             — Holà, c’est du bon !

             — De l’Irlandais, quinze ans d’âge.

             — Puis-je en ravoir un peu ? Ça m’a remise d’aplomb.

             Avec un bon sourire, le docteur Branquenstein lui resservit une rasade.

             — Et à présent, causons, proposa-t-il.

                                                                                                                                       (A suivre)


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  • La voyageuse (bis)

             Encore une histoire de train. Cette fois-là, j’étais seule. À côté de moi, une petite vieille.

             Arrive le contrôleur. La petite vieille plonge dans son sac et en sort une liasse de titres de transport qu’elle commence à consulter un à un.

             — Mon billet est là-dedans, dit-elle sans s’énerver.

             Et comme le contrôleur piétine :

             — Ne vous inquiétez pas, je vais le trouver, assure-t-elle.

             Je lui propose de l’aider ; elle refuse d’un sourire et poursuit sans moufter ses investigations. Pas besoin d’être devin pour comprendre qu’elle cherche à gagner du temps... 

             Prise de pitié, je m’apprête à intercéder pour elle — voire à payer sa place — quand, à mon grand étonnement, elle tend un billet à l’employé, en précisant :

             — Vous savez, je suis toujours en règle !

             Puis, une fois poinçonné, elle le refourre dans la pile.

           — Vous devriez jeter vos billets périmés, lui suggérai-je. Ça vous éviterait ce genre de mésaventure.

             Elle me décoche un regard malicieux. 

             — Jamais de la vie ! Voyez-vous, c’est mon jeu. J’adore mettre les contrôleurs dans l’embarras, leur faire croire que je suis une resquilleuse, et au dernier moment, leur prouver qu’ils ont tort. Vous ne trouvez pas ça drôle ? 

             En riant, elle referme son sac. Et je me sens ridicule, avec ma bonne conscience. 



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  • ... dégotée par Jean-Marie David sur le net. Merci, Jean-Marie !

    http://h-u-g-o-l-i-n.pagesperso-orange.fr/PDF/LA_PETITE_FILLE_QUI_MORDAIT_SES_POUPEES.pdf



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