• L’ultime vengeance

      Force m’est de l’avouer, à ma grand honte : je vous ai menti. Ce n’était pas entièrement ma faute. Durant quelques jours, j’ai cru en toute bonne foi — et Phiphi également — que Brigand était mort. Or, il ne l’était point, enfin, pas tout à fait. Une amputation lui sauva la vie, de sorte qu’il nous revint, deux semaines plus tard, avec une patte en moins.

             La rue de la Peur ayant, durant ce laps de temps, perdu son aura maléfique, Phiphi la parcourait d’un petit pas guilleret quand je le vis brusquement faire volte-face et revenir vers moi, rampant et la queue basse.

             Brigand était couché à sa place habituelle.

             En apercevant son souffre-douleur, le molosse, par réflexe, se leva pour le courser. Mais c’était compter sans son handicap. Après deux ou trois boitillements pathétiques, il se laissa retomber lourdement sur le sol. Surpris, Philémon pencha la tête de côté, dressa l’oreille... puis, tel David outrageant Goliath terrassé, il lui pissa dessus.

             J’ai débaptisé la rue de la Peur. Elle s’appelle maintenant « rue du Chien qui pisse ». Nous l’empruntons chaque jour, Phiphi et moi, la tête haute et le cœur léger. Ainsi meurent les mythes.   

    Une facétie de Phiphi, par Olivier Ka


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  •           Episode 30

       Résumé des chapitres précédents : que se trame-t-il donc sous la burka d’Aurore Audoigtdefée ?

     

             — Patron, elle est en train d’accoucher ! s’étrangla Zoé. Vite ! Appelez les pompiers !

             Tandis qu’Anatole,  ahuri, sortait son téléphone portable, Ruth Prout et Sire Concis déboulèrent à leur tour, attirés par les cris.

             — Ils ne sont pas sûrs d’arriver à temps, avec cette circulation, annonça le directeur. C’est l’heure de pointe...

             — Je m’en occupe dit Sire Concis. Zoé, Ruth, posez Aurore sur mon dos, et calez-la bien pour qu’elle ne tombe pas !

             Ainsi fut fait, de sorte qu’en quelques coups d’ailes, le dragon atteignit l’hôpital le plus proche, et la parturiente fut prise en charge par qui de droit.

             — Qu’est-ce qu’on fait de ses patients ? demanda Zoé à Anatole. Je n’y arriverai jamais toute seule.

             — Je peux prendre le relai, si vous voulez, proposa Ruth.

             Le directeur gratta sa calvitie naissante.

             — C’est très aimable de votre part, mais ils ne vous connaissent pas. Ça risque de les effaroucher...

             — Sauf si je mets ceci !

             Du doigt, elle indiquait la burka qui traînait en petit tas par terre.

             Ainsi reprit-elle l’œuvre interrompue par l’accouchement de l’artiste, sans que les clients se rendent compte qu’ils avaient changé de main.

              — Brave petite, dit Anatole en essuyant une larme. Une fois de plus, elle nous sauve la mise. C’est le Ciel qui l’a placée sur notre route !

                                                                                                                                              (à suivre)


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  • Onirisme

      Antoine est vraiment l’antithèse d’un Don Juan. Petit, gros, précocement ravagé par l’alcool, doté de dents pourries et d’une conversation soporifique... Vous voyez le tableau ? Pourtant, une nuit, ô facétie de l’inconscient, je rêve de lui. Un rêve torride, oui, oui. Et follement agréable.

             Le lendemain, en le croisant, je rougis, troublée. Tous mes émois nocturnes me reviennent en vrac. S’il pouvait lire dans mes pensées, il n’en reviendrait pas, le pauvre homme !

     


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  • Episode 29

       Résumé des chapitres précédents : A y est, le silo a été vidangé dans la mer. Toute trace du passage sur terre du Petit Prince est effacée. Enfin... espérons-le !

     

              — Tu peux me remplacer ? demanda Aurore d’une voix vacillante.

             Elle se tenait dans l’embrasure de la porte du cabinet particulier de Zoé.

             — Pas de problème, répondit celle-ci, sans interrompre son activité (dont le dénouement était proche). Accorde-toi une petite pose, ma poule !

             — Merci...

             Quelque chose dans son intonation mit Zoé en alerte. Levant la tête vers la forme sombre qui lui faisait face, elle remarqua.

             — Dis donc, tu n’aurais pas légèrement grossi, toi, ces derniers temps ?

             A travers le grillage textile, les yeux d’Aurore se révulsèrent ; Elle poussa un gémissement, porta ses deux mains à son ventre et s’effondra.

             — Mon Dieu ! souffla Zoé, en se précipitant à son secours.

             — Eeeeh ! protesta le client. Qu’est-ce que je fais, moi ? Je me continue tout seul ?

             — Ben quoi, t’es manchot ? rétorqua Zoé.

             Puis, tout en soutenant sa collègue évanouie, elle appela :

             — Patron ! A l’aide !

             Anatole Youplala surgit de son bureau pour lui préter main forte. Ils allongèrent Aurore sur le canapé de l’entrée, et Zoé lui retira sa burka. Une surprise — et de taille — l’attendait sous le drap noir...

       (à suivre)


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  • L’enfer est pavé de fromage pourri

      Nous étions vraiment dans la dèche, cette année-là. Frédéric, 11 ans, et Olivier, 9 ans, mis au courant de la situation, décidèrent, d’un commun accord, d’apporter leur contribution à l’effort collectif. Ils prirent donc l’habitude — adorable, ma foi — de rafler tout ce qui traînait sur la table de la cantine, pour  ramener « des provisions » à la maison. Des petits pains, en particulier, que nous consommions au repas du soir.

             Un jour d’été, en ouvrant le panier à linge, je suis prise à la gorge par une odeur atroce. Surprise, j’en cherche la cause… et découvre, dans la poche du jean d’Olivier, une part de camembert oubliée depuis plusieurs jours.

             Sûr, il avait voulu améliorer notre ordinaire. C’est fou comme, parfois, les bonnes intentions puent !

     


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